Interrogée ce dimanche par RTL, la ministre des sports, Roxana Maracineanu, a relancé les craintes de nombreux observateurs: sans vaccin contre le coronavirus, le sport ne pourrait pas revenir à la normale avant longtemps. Autrement dit, un huis clos intégral pourrait être envisagé sur toute la saison 2020-2021 et même au-delà, tant que la crise sanitaire perdurera.
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Ainsi plus de supporter dans les stades, plus de spectateur, plus de public, des enceintes sportives vidées de leurs substances, sans ambiance, sans charme, sans âme. Le principe de précaution l’emporterait ici et empêcherait toute possibilité de passe-droit, d’ouverture. Les regroupements de plus de 500, 1.000 personnes restent trop dangereux, trop incertains, encore plus avec une pandémie qui se maintient et sans aucun vaccin ni remède trouvé, l’évidence a pris le pas sur la passion.
D’énormes pertes parmi les clubs de football
Mais cette précaution va aussi provoquer de terribles chambardements économiques. Rien qu’en football, des championnats européens à huis clos coûteraient au total plus de 4 milliards d’euros sur la seule saison 2020-2021, selon une étude commandée par l’ECA, le syndicat européen des clubs. « C’est un désastre financier particulièrement pour les clubs qui ont de nombreux fans. […] Sur le plan économique, plus longtemps la crise durera et moins les grands clubs auront la capacité à obtenir l’intégralité de leurs revenus. Et plus graves seront les conséquences », a alerté Charlie Marshall, un dirigeant du syndicat.
Des clubs comme Arsenal ou Manchester United pourraient perdre jusqu’à 150 millions d’euros. Idem côté français, avec le Paris Saint-Germain qui enregistrait, en 2019, 111 millions de recettes billetterie, soit 17% de son chiffre d’affaires, selon le rapport Deloitte. Sans supporter ni spectateur, ces recettes seraient totalement effacées des tablettes. Un gouffre financier.
Le rugby, le basket et le handball plus impactés
Mais cela n’est rien comparé aux autres disciplines, bien plus dépendantes des revenus matchs et des recettes billetterie. En rugby notamment, l’intégralité des ressources issus du stades, avec les tickets, les loges, les revenus commerciaux (sponsoring, merchandising, marketing) représente, en moyenne, 60% d’un budget d’une équipe du TOP14.
Une saison à huis clos, avec des stades entièrement vides, serait une catastrophe économique. « La mort annoncée du rugby français », selon Laurent Marti, président de l’Union Bordeaux-Bègles. Le rugby professionnel serait en danger de disparition.
Concernant le basket ou le handball, même son de cloche. Parmi les clubs de premières divisions, la manne des droits TV est bien trop faible pour compenser l’apport des recettes matchs. En Jeep Elite, la billetterie représente 17% du budget total des clubs, à laquelle il faut rajouter les apports issues des loges, des buvettes, des produits dérivés, du sponsoring locale, des partenariats commerciaux, etc… Au total, plus de la moitié du chiffre d’affaires est réalisée par l’enceinte sportive.
En LIDL Starligue, la première division de handball, 55% du chiffre d’affaires des 14 clubs professionnels est réalisé par les recettes billetterie et commerciales issues du stade. En jouant une saison sans supporter, sans spectateur, sans consommateur potentiel, les pertes pourraient être incommensurables, catastrophiques, destructrices.
Vers la fin du sport professionnel?
D’après Emmanuel Bayle, professeur de gestion à l’Université de Lausanne, cette période incertaine annonce « une ré-amateurisation des disciplines sportives », une disparition provisoire d’un grand nombre de clubs et une suspension de leur statut professionnel.
En jouant à huis clos, les équipes les plus puissantes, les mieux structurées et armées réussiront à survivre, pourront tenir de long mois, pourront profiter, comme en football, de la manne télévisuelle. Mais concernant les plus petites, issues de disciplines moins cotées, moins populaires que le football, leur avenir s’annonce passablement inquiétant…
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