Officiellement nommé entraîneur du Stade rennais jeudi soir, et présenté ce vendredi, Bruno Genesio serait selon le directeur technique Florian Maurice le technicien idéal pour le projet breton, car performant, adepte du beau jeu et à l’aise avec l’idée de s’appuyer sur les jeunes du centre de formation. Mais a-t-il vraiment laissé cette trace à l’OL?
Vingt-et-un mois. Vingt-et-un mois que le football français ne l’avait pas vu à l’œuvre. Mais Bruno Genesio est de retour. Quelques jours après la démission de Julien Stéphan, l’ancien coach de l’OL (décembre 2015-juin 2019) a été officiellement nommé sur le banc du Stade rennais jeudi soir, et ce jusqu’en juin 2023.
« Il a fallu réagir très vite pour trouver un entraîneur qui rentrait dans le projet que l’on souhaite mettre en place au Stade rennais, a justifié le directeur technique Florian Maurice. C’est-à-dire un entraîneur dynamique capable de produire du jeu, capable de s’appuyer sur les jeunes issus de la formation, qui a de l’expérience dans un club de haut niveau dans des compétitions importantes. On a besoin d’un entraîneur entraînant. Il est capable de sublimer les joueurs. Il connaît parfaitement la Ligue 1, qui est très particulière et très dure. Son profil correspondait totalement au Stade rennais. Il fallait quelqu’un de performant immédiatement. »
Une présentation assez flatteuse, et surtout à mille lieux du portrait de Genesio dressé par certains supporters à son époque lyonnaise. Maurice a-t-il été trompé par ses souvenirs, ou a-t-il vu juste?
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Genesio est-il un entraîneur « performant »?
Bruno Genesio à Lyon, c’est 185 matchs en tout, pour 101 victoires, 37 nuls et 47 défaites. Autrement dit, 55% de succès, l’un des meilleurs pourcentages de l’histoire du club. En Ligue 1, le technicien affiche un bilan comptable de 76 victoires, 26 nuls et 31 défaites en 133 rencontres. Soit une moyenne d’1,91 point pris par match. C’est mieux que Rémi Garde (2011-2014), et sa moyenne de 1,68 point par match (avec un effectif plus limité), c’est mieux qu’Hubert Fournier avec sa moyenne d’1,77 point par match, et c’est exactement comme Rudi Garcia, qui tourne aussi à 1,91 point par match depuis son arrivée.
De ce point de vue-là, Genesio est donc un entraîneur assez performant dans l’histoire récente du club rhodanien. Mais tout n’est évidemment pas aussi simple. Si son OL a gagné des matchs, beaucoup plus qu’il n’en a perdu, il n’a jamais remporté le moindre titre, et surtout, n’a jamais été proche d’y parvenir.
Deuxième de L1 en 2016, quatrième en 2017, troisième en 2018 et troisième en 2019, Lyon a toujours terminé très loin du champion, qu’il soit parisien ou monégasque. Et ce même en battant plusieurs fois le PSG dans les confrontations directes. Dans les coupes nationales, l’OL est souvent passé à côté de son sujet, et la demi-finale de Coupe de France perdue contre Rennes au printemps 2019 – la meilleure performance de Genesio – lui a en partie coûté sa place.
Sur la scène européenne, là encore le bilan est mitigé. Si la victoire sur le terrain de Manchester City en septembre 2018 (2-1) est restée dans la légende, si l’OL avait fait jeu égal avec la Juventus deux ans plus tôt, force est de constater que le Lyon de Genesio n’a remporté que 3 matchs sur 14 en Ligue des champions: un contre City, donc, et deux… contre Zagreb. Reste tout de même l’épopée en Ligue Europa en 2016-2017, avec les victoires contre la Roma et Besiktas, avant de chuter face à l’Ajax en demie. L’OL n’a jamais eu droit à sa finale.
Bruno Genesio à Lyon © AFP
Genesio est-il un entraîneur « capable de produire du jeu »?
« Quand on voit jouer Lyon, on ne s’emmerde pas », disait Bruno Genesio dans un entretien à L’Equipe en août 2018. Statistiquement, c’est assez vrai: avec une moyenne de 2,11 buts marqués par match, son équipe était portée sur l’attaque. Mais elle était aussi très friable défensivement, évoluant dans une sorte de déséquilibre permanent.
Ses détracteurs lui ont reproché de manquer de style, d’identité? C’est sans doute plus la maitrise qui faisait défaut. Une impression renforcée par les nombreux changements de systèmes, et les nombreux changements de postes des joueurs, à l’image de Corentin Tolisso ou Nabil Fekir, qui ont beaucoup voyagé sur le terrain…
« On avait un jeu très porté sur l’offensive, qui amenait un certain déséquilibre défensif, reconnaissait l’intéressé sur OLTV en avril 2020. Ça a pu laisser penser que j’étais un fou et qu’on ne travaillait rien à l’entraînement. Je l’assume. Mais lorsque l’on dit qu’il n’y avait rien, qu’on ne travaillait pas, qu’il n’y avait pas de principe de jeu, pas de fonds de jeu, qu’il n’y avait pas d’entraîneur et que c’était simplement des exploits individuels qui faisaient qu’on marquait des buts et qu’on gagnait des matchs, ça, je ne peux pas l’entendre. »
En outre, et cela rejoint le premier point sur les résultats, l’OL à la sauce Genesio a été assez régulier dans l’irrégularité. A quelques exceptions près, son équipe a souvent été intéressante lors des grandes affiches, face au PSG, l’OM ou Saint-Etienne en France, face à la Juve, City, ou Rome en Europe. Mais à quelques exceptions près, son équipe a souvent manqué d’idées contre les plus petits. Sa responsabilité n’est sans doute pas totale, ni pour le positif, ni pour le négatif. Enfin, reconnaissons une certaine capacité de rebond au technicien. Quand Lyon était dans le dur, et que sa position semblait fragilisée, l’équipe a souvent réagi sur le pré.
Genesio est-il un entraîneur « capable de s’appuyer sur les jeunes issus de la formation »?
Parce qu’il s’est occupé du groupe « pro 2 » sous Claude Puel, travaillant avec Alexandre Lacazette, Clément Grenier ou Jordan Ferri, et parce qu’il a été l’adjoint de Rémi Garde, qui s’est beaucoup aidé de la formation, Bruno Genesio est régulièrement décrit comme un amateur de pépites maison, qui n’hésite pas à faire confiance aux jeunes du club.
En tant qu’entraîneur en chef, l’ancien milieu de terrain a véritablement lancé trois joueurs dans le grand bain: Houssem Aouar, qu’il a testé en 2016-2017 avant de l’installer dans le onze en 2017-2018, Myziane Maolida, qui a fait une vingtaine d’apparitions en 2017-2018 avant d’être transféré à Nice, et Mouctar Diakhaby, souvent utilisé en 2016-2017 et qui partira pour Valence à l’été 2018.
Amine Gouiri aurait pu faire partie de cette liste, mais après ses premières apparitions en 2017-2018, l’attaquant s’est sérieusement blessé à un genou et a ensuite vécu une saison 2018-2019 blanche, ce qui n’est pas du fait de Genesio. Pour Maxence Caqueret, un débat existe: Genesio lui a offert deux apparitions en Coupe de France début 2019, sans suite. Il se dit que le technicien avait prévu de véritablement lui donner sa chance la saison suivante. Il n’en a pas eu l’occasion, et c’est avec Rudi Garcia que le milieu a pris son envol.
Sinon, un certain nombre de jeunes venus de la formation ou arrivés en post-formation (Jordy Gaspar, Olivier Kemen, Willem Geubbels, Oumar Solet, Lenny Pintor…) ont eu droit sous Genesio à deux, trois, quatre petites apparitions, pour ensuite disparaitre des radars. Certains n’avaient pas le niveau, c’est une évidence, Geubbels était dans une situation contractuelle délicate, d’autres ont peut-être fait les frais d’un raisonnement plus court-termiste. Quand un entraîneur est sous pression, et qu’il doit prendre des points, il est souvent plus facile de miser sur l’expérience.
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