Julien Stéphan a décidé de démissionner de ses fonctions d’entraîneur, ce lundi, en pleine crise de résultats. Il laissera une trace indélébile dans l’histoire du Stade Rennais malgré cette dernière saison délicate.
Julien Stéphan n’est plus l’entraîneur du Stade Rennais depuis ce lundi. Il a présenté sa démission à ses dirigeants qui l’ont acceptée en pleine crise de résultats alors que son équipe a gagné un seul match en 2021. Il s’en va sans avoir signé une saison complète sur le banc des Rouge et Noir entre sa nomination en cours de saison en décembre 2018, l’arrêt de l’exercice 2019-2020 en raison du coronavirus et sa démission-surprise. Mais en 110 matchs passés sur le banc breton, il a durablement marqué l’histoire du club.
Des résultats historiques
C’est une chose assez rare en pareille circonstance: l’annonce de la démission de Julien Stéphan a provoqué une vague de remerciements en sa direction de la part des supporters sur les réseaux sociaux. La saison compliquée avait bien crispé les débats mais le passage de Stéphan restera comme le plus marquant depuis plusieurs décennies à Rennes. Sous ses ordres, le Stade Rennais a décollé son étiquette de loser. L’équipe a réussi à sortir des phases de poules de la Ligue Europa pour la première fois de son histoire, même si Sabri Lamouchi avait réalisé une grosse part du travail en dirigeant l’équipe lors des cinq premières journées de la compétition.
Julien Stéphan et la Coupe de France © ICON Sport
Mais la victoire face à Astana (2-0) en décembre, quelques semaines après sa nomination, a lancé la plus belle aventure européenne de l’histoire du club. Elle fut très courte à l’échelle de la compétition puisque le Stade Rennais s’est finalement arrêté dès les 8es de finale. Mais les émotions furent d’une intensité rare dans l’histoire du club entre la double confrontation complètement folle face au Betis Séville (3-3 à l’aller, victoire 1-3 en Andalousie au retour) ou la victoire face à Arsenal (3-1) un soir le Roazhon Park a tremblé comme rarement sur l’echelle de Richter.
Julien Stéphan lors de la victoire de Rennes au Bétis © Capture
Le parcours s’était achevé au retour (3-0) mais l’état de grâce s’était prolongé par le gain de la Coupe de France après une victoire face au PSG en finale (2-2, 6 tab 5), plongeant un peuple déçu par trois finales perdues de rang (coupe de France 2009 et 2014, Coupe de la Ligue 2013) dans une liesse sensationnelle. Et puis, il y eut la saison de la confirmation avec une grosse cerise sur la gâteau: la pemière qualification en Ligue des champions dans l’histoire du club. Rennes était troisième au moment de l’arrêt du championnat à cause du coronavirus avant de profiter du succès du FC Séville en Ligue Europa pour s’inviter directement en poules. Du jamais-vu.
Une grosse « hype »…
Il n’était alors qu’entraîneur de la réserve mais la réputation de Julien Stéphan avait déjà percé avant qu’il ne soit nommé numéro 1 par Olivier Létang en décembre 2018. Thierry Henry, alors entraîneur de Monaco, avait tenté de le débaucher pour en faire un de ses adjoints. Rennes avait refusé à moins d’une compensation financière jugée trop importante par l’ASM. Stéphan, qui avait lancé Eduardo Camavinga chez les jeunes, était resté avant d’être promu quelques semaines plus tard. Il a vite conquis les supporters par une série de six victoires de suite, toutes compétitions confondues, dont une éclatante à Lyon (0-2) pour ses débuts. Létang l’a d’abord prolongé jusqu’à l’été suivant, avant d’étendre son bail jusqu’en 2022. Lors de sa première saison, il avait fait en sorte de donner les clés du jeu à Hatem Ben Arfa tout en relançant Mbaye Niang, en difficulté avec Lamouchi.
Son succès est aussi dû au puissant storytellling de son parcours, lui, le natif de Rennes, où son père Guy, l’actuel sélectionneur adjoint l’équipe de France, était brièvement passé au cours de sa carrière. Il incarnait cette identité locale longtemps pronée par la famille Pinault avant d’en abandonner l’idée face aux réalités du football mondialisé. Il est ainsi vite devenu l’étendard d’un public qui a clamé son nom à plusieurs reprises, et prenant notamment fait et cause en sa faveur lors de ses relations conflictuelles avec Olivier Létang.
Olivier Létang a promu Julien Stéphan entraîneur mais les relations entre les deux hommes se sont détériorées © AFP
Parce que Stéphan manie parfaitement sa communication auprès de ses joueurs qui ont souvent loué ses puissantes causeries. Face à la presse, il a aussi su se montrer clair, en axant ses propos sur le jeu, sans éclat de voix mais avec fermeté et une connaissance presque encyclopédique de ses adversaires. Conforté par l’actionnaire en février 2020 après le départ de Létang, il a mué vers un système de jeu basé sur la possession. Celui-ci a porté ses fruits quand les joueurs se mettaient au diapason. Il s’est largement effrité ces dernières semaines quand les troupes ont levé de pied, par lassitude ou fatigue.
…mais une fin compliquée
En démissionnant, Julien Stéphan semble avoir acté une cassure avec son groupe qu’il a souvent su remobiliser. En attendant des explications des dirigeants ce lundi à 13h15, il semble transmettre le message que cela n’était pas possible cette fois. Il quitte aussi « son » club, où il a passé neuf ans, sans réclamer son dû puisqu’il lui restait 16 mois de contrat. Cela effrite son bilan au terme d’une dernière saison débutée très fort (1er après 5 journées) mais malmenée par l’enchaînement des matchs de Ligue des champions.
Ce grand écart de niveau physique et d’exigence a coûté très cher à l’effectif, pourtant renforcé par les arrivées de Martin Terrier, Serhou Guirassy, Jérémy Doku ou Nayef Aguerd l’été dernier. Le trio Holveck (président)-Maurice (directeur sportif)-Stéphan (entraîneur) formé l’été dernier a très souvent loué sa forte complicité, Holveck conffortant encore Stéphan dans ses fonctions vendredi. Mais les trois hommes partagent l’échec du recrutement parfois difficile à suivre comme la décision de laisser partir Raphinha (Leeds) en toute fin de mercato ou de dépenser 14 millions d’euros pour recruter le gardien Alfred Gomis (Dijon), moins rassurant que son prédécesseur Edouard Mendy, parti à Chelsea après seulement une saison au club.
Ces dernières semaines, Stéphan avait fait part de sa lassitude face aux attaques subies de la part de certains consultants. Un départ en fin de saison semblait se dessiner pour Julien Stéphan, qui avait confié sa volonté de réfléchir l’été prochain. Il quitte Rennes en perte de vitesse mais toujours en course pour une qualification européenne. A douze matchs de la fin, le Stade Rennais est 9e à 3 points de la 5e place.
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