Accusés d’avoir organisé ou joué un rôle majeur dans l’attaque du centre RLD, le 30 janvier dernier, cinq leaders de groupes de supporters ont été jugés par le tribunal correctionnel de Marseille, ce lundi. Quatre ont été reconnus coupables, trois ont écopé de peines de prison ferme, avec des aménagements. Un a été relaxé.

Près de deux mois après les incidents à la Commanderie, le 30 janvier dernier, les échanges ont parfois été tendus entre le tribunal correctionnel de Marseille et certains leaders de groupes de supporters de l’OM ce lundi. Ils étaient cinq à comparaître. Trois d’entre eux ont été condamnés à des peines de prison ferme (voir ci-dessous), avec des aménagements qui vont leur éviter d’aller derrière les barreaux.

Au tribunal, il y a eu d’abord les regrets de certains dirigeants d’associations, notamment Rachid Zeroual, le vice-président des South Winners: « Si j’avais su que cette manifestation allait dégénérer, on n’aurait jamais organisé ce rassemblement. Je voulais que ça se fasse pacifiquement. Certains ont pété les plombs quand ils ont vu les grilles fermées. Je me suis senti trahi. » Zeroual reconnait avoir publié un message de mobilisation sur Facebook. Il promet surtout agir depuis 33 ans pour le bien de son association. « J’essaye d’en faire un groupe de supporters, pas un gang. Je me sens comme un ancien qui veille sur l’ambiance au Vélodrome et sur la vie au local des Winners. N’oubliez jamais notre dévouement pour les minots et les actions sociales que l’on mène. »

Les SMS d’Aldebert et d’Eyraud à Rachid Zeroual

La présidente Nathalie Marty l’interrompt à plusieurs reprises, ou le sermonne: « Vous ne faites pas votre show ». Elle dévoile deux SMS envoyés par les dirigeants de l’OM à Rachid Zeroual, après les incidents. Le premier message de Thierry Aldebert, alors monsieur sécurité: « Quelle honte. Vous avez finalement donné raison à ceux qui vous traitent de hooligans ». Le deuxième, de Jacques-Henri Eyraud, alors président: « Comment avez-vous pu commettre l’irréparable ? On me dit que tu étais parmi eux ! ». Zeroual, qui confie être malade et fatigué, a une autre lecture des événements. « Je les ai prévenus la veille. L’OM savait que l’on devait débarquer, j’ai des SMS qui le prouvent. On est arrivé, les CRS avaient disparu ! Tout a été organisé pour que ça dérape. »

Christophe Bourguignon, président du CU 84, est lui aussi interrogé. Le tribunal s’étonne du « code » vestimentaire mis en place : « Tous habillés en noir et cagoulés, c’est normal pour une manifestation pacifique ? », questionne la présidente du tribunal. Elle précise que le disque dur de l’ordinateur, saisi au local des Ultras lors d’une perquisition, a été effacé le 31 janvier, au lendemain des incidents.

On reproche aussi un rôle de leader à Hamza B., l’un des dirigeants des Winners également. Ce 30 janvier, il est aperçu debout sur un bureau du centre RLD, faisant des grands gestes face à Alvaro et Mandanda. Hamza B. reconnaît qu’il était « révolté et énervé ». Il explique que l’OM envoie très souvent Mandanda « en bouclier », face aux fans de l’OM.

Un trésorier des MTP dans le viseur pour avoir distribué des fumigènes

Christophe C., ex-capo des Winners, droit et costaud, assume, à la barre. « Je suis allé discuter avec le chef : André Villas-Boas. Je me suis mis devant, et heureusement ! Car j’ai gardé une certaine aura vis-à-vis des autres supporters. C’est vrai, j’ai fait l’idiot. Mais on donne tellement pour ce club, la relation entre l’OM et ses supporters est si forte, que je pense avoir le droit d’exprimer notre colère quand il faut faire passer un message. »

Enfin, Mehdi D., trésorier de l’association MTP (Marseille Trop Puissant), est dans le viseur pour avoir notamment distribué une vingtaine de fumigènes au cœur du cortège et en avoir lancé un dans le PC Sécurité, au moment où l’entrée de la Commanderie a été forcée. On retrouvera son empreinte ADN sur ce fumigène, ce qui le forcera à avouer. C’est avec lui que les réquisitions du procureur adjoint de la République de Marseille auront été les plus sévères : 9 mois ferme.

André Ribes, le procureur adjoint, argumente : « Dans ce type d’incidents, celui qui les organise est plus coupable que celui qui les commet. Faire passer ses idées par la violence, ce n’est pas possible ! Vous dites qu’il ne faut pas confondre casseurs et supporters. Mais ce n’est pas de ma faute si tous ces supporters étaient aussi des casseurs ! » Il requiert par ailleurs 9 mois de prison dont 5 avec sursis pour Zeroual et Bourguignon. Et 10 mois avec sursis pour Hamza B. et Christophe C.

L’avocat de l’OM ne charge pas les Ultras ou les Winners

Auparavant, la plaidoirie des avocats de l’OM, partie civile dans ce dossier, avait également ciblé principalement l’action isolée du trésorier des MTP. Olivier Grimaldi, avocat OM : « Le plus grave pour nous, ce ne sont pas les Ultras ou les Winners, c’est le fait qu’un trésorier des MTP distribue des fumigènes. C’est inadmissible ! Nous en avons parlé avec la présidente de l’association, elle était révoltée. Si cela avait été un acte collectif, il n’y aurait plus de MTP aujourd’hui, comme il n’y a plus de Yankee aujourd’hui. »

L’avocat de l’OM reconnaît que « Rachid Zéroual est pénible », mais « dire que ces incidents sont de la faute des Winners, je n’y arrive pas, j’ai une position analogue pour les Ultras ».

Une main tendue, très clairement, alors qu’une nouvelle convention OM / groupes de supporters est en train de voir le jour, dans un contexte d’apaisement souhaité également par le propriétaire du club Frank McCourt et le nouveau président Pablo Longoria.

Lors de leur plaidoirie, les avocats de l’OM ne s’en cachent pas, et calment le jeu avec leurs associations de supporters. « Ce n’est pas le procès des supporters, c’est le procès des casseurs. L’OM ne peut pas vivre sans ses supporters et l’OM n’a pas la capacité de choisir ses supporters. » Une ligne bien plus souple que l’aurait souhaité un certain Jacques-Henri Eyraud, dont les oreilles ont peut-être sifflé ce lundi, via cette dernière punchline d’un des avocats du club : « L’OM, ce n’est pas Game of Thrones (comme l’avait décrit JHE dans le magazine So Foot.) Il n’y a pas de tribu sauvage, de trône de fer. Ce ne sont pas des motards hors la loi avides de corruption et de violence. »

Des aménagements de peine pour les quatre supporters condamnés

Le tribunal correctionnel de Marseille a rendu son délibéré en début de soirée, ce lundi. Il a estimé qu’il y avait plusieurs preuves d’une organisation en vue de dégradations et violences : tracts, réunions, annonce sur les réseaux sociaux, heure de rassemblement, et distribution de matériel notamment.

Mehdi D., le trésorier des MTP, a écopé d’un an de prison ferme mais sa peine est aménagée avec un bracelet électronique à porter au domicile. Rachid Zeroual et Christophe Bourguignon sont condamnés à 9 mois de prison dont 5 avec sursis, avec également un aménagement de peine. Ils ne vont donc pas non plus en prison. Hamza B., des Winners, est puni de 10 mois de prison avec sursis. Enfin, Christophe C., l’ex-capo des Winners, est relaxé.

Florent Germain

https://rmcsport.bfmtv.com/football/ligue-1/om-incidents-de-la-commanderie-quatre-leaders-de-groupes-de-supporters-condamnes_AV-202103220461.html

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