De Bourgoin à un buteur régulier en Ligue 1 avec l’OGC Nice, des U16 de l’Equipe de France au capitanat des Espoirs. A 21 ans, Amine Gouiri franchit des paliers à une vitesse folle et sait séduire tous ceux qui croisent sa route. L’homme à suivre du berby Nice-Monaco dimanche.
Un papa, trois frères et des oncles footballeurs, quand il naît le 16 février 2000 à Bourgoin, un ballon rond attend déjà Amine Gouiri. « Tout petit je l’emmenais voir ses grands frères au stade et rapidement, il a pris le ballon », rembobine son papa, Zaïr. « Je me disais «tiens, il a déjà une sacrée conduite de balle». Je l’ai inscrit à 7 ans au club de l’Isle d’Abeau (Isère) puis quand il a eu 11 ans j’ai voulu le faire signer à Bourgoin-Jallieu pour tenter le tremplin car le club était partenaire de l’Olympique Lyonnais. » Un OL qui sortait d’un début de millénaire doré enchaînant 7 titres de champion de France (entre 2002 et 2008).
Toujours surclassé
Le fiston réticent à l’idée de rejoindre Bourgoin, Zaïr a dû le pousserun peu. Un pari réussi puisqu’en 2012, le garçon termine meilleur buteur de différents tournois dont la Danone Cup en Pologne. Manuel De Almeida, manager du club de Bourgoin se souvient « Au bout de deux matchs, on l’a surclassé en U13 et il continuait de mettre buts sur buts. Deux ou trois mois plus tard, il était avec les U15 et répondait encore présent. Lors d’un challenge Crédit Agricole à Clairefontaine, un éducateur vient me voir en me disant qu’il était impossible qu’Amine soit né en 1999, je lui ai répondu qu’il avait raison, qu’Amine était un 2000 (rires). Il avait déjà cette qualité devant le but et cette soif de gagner même lors des petits jeux d’entraînement. »
L’adolescent, qualifié de « réservé » par ses éducateurs de l’époque, tape dans l’œil de l’Olympique Lyonnais mais le club partenaire n’est pas le seul à vouloir attirer le jeune Amine. « Il y avait plusieurs sollicitations dont Nancy qui l’avait invité pour un Nancy-PSG et lui avait offert un maillot d’Ibrahimovic », se remémore Manuel De Almeida.
« Mais il était fan de Lyon et on préconisait avec la famille la proximité donc c’était plus simple pour sa préformation », reprend ce derneir. Fin de saison 2013, Amine Gouiri rejoint donc les U14 de l’Olympique Lyonnais puis rapidement l’échelon supérieur. Chez les Gones, l’attaquant connait une évolution que Zaïr, son papa, juge « progressive », lui qui entendait souvent son fiston être assimilé à l’enfant du pays, Karim Benzema. « C’est vrai qu’il avait sa posture, ses courses, il était aussi fan du Real… Il n’avait pas de posters de lui dans sa chambre mais c’était une référence. »
Sans imiter l’actuel capitaine du Real Madrid, le Bergusien performe lui permettant d’être sélectionné en Equipe de France sous l’œil de Lionel Rouxel. « En U16 et U17 Amine était notre buteur », explique l’actuel sélectionneur de l’Equipe de France U18. « Il avait besoin d’être important sur le travail défensif pour être en lien avec le reste de l’équipe. Il a travaillé là-dessus et a pris conscience qu’il fallait faire des efforts, c’était un axe de progression sur lequel il a bien évolué. »
Sa blessure au genou, un frein de courte durée
Etiqueté « Grand Espoir de l’OL », Amine Gouiri est sur la voie du succès. En 2017, il termine meilleur buteur de l’Euro U17 en Croatie puis inscrit 4 buts en autant de matchs lors de l’Euro U19 l’année suivante. Mais de retour à Lyon en août 2018, après avoir goûté à la Ligue 1 la saison précédente (7 apparitions), le genou du crack cède lors d’un entraînement avec la réserve. Diagnostic: rupture isolée du ligament croisé antéro-interne du genou gauche. « Sa blessure, c’est la fatigue », résume Zaïr, le père du footballeur. « Après l’Euro il s’est dit qu’il fallait revenir vite pour retrouver sa place en professionnel mais à 18 ans, le corps a aussi besoin de se reposer. Il a repris les entraînements après une ou deux journées, n’a pas fait attention, voilà. L’erreur est humaine, c’est un passage à vide mais ce n’est pas grave. » Sur le flanc pendant six mois, il ne sera plus appelé ni par Bruno Genesio, ni par Rudi Garcia si ce n’est quelques secondes, à la 96e minute d’un soir de février, sur la pelouse de Saint-Symphorien à Metz, pour remplacer un Moussa Dembélé buteur (2-0).
La cote sur la Côte d’Azur
Amine Gouiri décide alors de prendre son envol et de rejoindre les Aiglons à l’été 2019.
« Evidemment qu’on aurait préféré le voir exploser avec l’Olympique Lyonnais », regrette Manuel De Almeida, son pré-formateur à Bourgoin. « Mais il avait besoin de jouer et je vois qu’avec Nice, il s’épanouit. » En Côte d’Azur, Amine Gouiri se montre ambitieux annonçant au directeur du football, Julien Fournier, qu’il n’est certainement pas venu pour être remplaçant. En février dernier, alors que l’OGC Nice s’apprête à affronter le Paris-Saint-Germain, Adrien Ursea confesse: « Il n’était vraiment pas prévu qu’il joue autant car dans notre esprit, il était arrivé en doublure de Kasper Dolberg ».
Privé de l’attaquant danois victime d’appendicite, le coach de Nice reprend: « C’est difficile de l’enlever de l’équipe maintenant, il est si efficace. » En effet, Amine Gouiri termine sa première saison pleine en Ligue 1 avec 12 réalisations. Cette saison, après 4 rencontres (si l’on omet le Nice-OM à rejouer), l’ex-Lyonnais a déjà inscrit 4 buts, de quoi séduire son actuel entraîneur Christophe Galtier. « J’avais déjà entendu pas mal de choses sur lui lorsqu’il était dans son club formateur et il a fait une très grosse dernière saison. Il a cet atout d’être polyvalent, il est encore jeune et plus il aura de bagage technico-tactique, mieux ce sera pour la suite de sa carrière. Il a besoin des autres mais aussi aime faire jouer les autres, j’étais persuadé qu’il allait pouvoir s’adapter dans ce schéma à deux attaquants. »
Un schéma incluant le nouvel arrivant Andy Delort ou Kasper Dolberg. « Je pense qu’Amine a encore franchi de nouveaux paliers ces derniers mois », avoue le Danois « C’est un joueur qui a énormément de qualité, vraiment fort, c’est un plaisir pour moi de jouer avec lui. » Plaisir d’offrir, joie de recevoir, les supporteurs niçois sont bluffés par celui qui a pris une place importante dans leur cœur. « Il prouve à tous les matchs qu’il porte notre attaque. Je viens souvent à l’entrainement et je vois qu’il travaille bien, qu’il suit les conseils du coach, ça ne peut que lui servir », s’enthousiasme le vétéran Alain suivi par le jeune Benjamin. « 20 buts depuis son arrivée ici, c’est fantastique. C’a été l’homme fort de l’année dernière malgré la saison difficile. On se souvient de son doublé pour son premier match à domicile contre Lens, c’était la révélation. Je pensais que ç’allait être compliqué cette année et non, il repart sur des bases similaires. J’ai l’impression que chaque année il va progresser, on ne sait pas où il va s’arrêter. » Virginie, elle, est venue au centre de la Plaine du Var avec deux photos de son idole qu’elle arbore fièrement « Je suis une fan absolue, j’adore. Il est très accessible, photos, autographes, il sort de la voiture, il pose avec nous. Je fais beaucoup la sortie des joueurs et il est là, à discuter un moment avec nous, il est très sympa. »
Un destin en Bleu ?
Fraîchement promu capitaine de l’Equipe de France Espoirs, la suite logique pour Amine Gouiri serait une sélection avec les A. Pour son coach, Christophe Galtier, c’est encore trop tôt. « Je trouve qu’il est encore loin du niveau quand je vois jouer l’équipe de France et qui sont les joueurs à son poste. Il a encore beaucoup de chemin à parcourir mais il met toutes les chances de son côté parce qu’il travaille beaucoup, il est très investi. Il travaille avant, pendant et après l’entraînement. Il a de l’ambition, c’est bien. Il a de la personnalité, c’est très bien. Qu’il continue comme ça mais quand on parle de l’équipe de France, il y a une sacrée concurrence. Il en est encore loin, il aura besoin de quelques saisons pleines avec des matchs européens. »
Lionel Rouxel, responsable des Equipes de France jeunes, énumère, lui, les axes de progression du Niçois: « Aujourd’hui Amine est un joueur important en Espoirs. C’est un leader technique et doit désormais être un leader de vestiaire, c’est un des progrès qu’il doit réaliser. De par ses performances, son attitude et son comportement en Espoirs, j’espère pour lui qu’un jour la porte des A s’ouvrira mais il ne doit pas être dans l’impatience, il doit être dans la performance. »
De par son père Zaïr, originaire de la Petite Kabylie, Amine Gouiri est aussi éligible pour rejoindre la sélection algérienne garnie par ses coéquipiers Hicham Boudaoui, Youcef Atal et Andy Delort. D’autant plus que Djamel Belmadi, le sélectionneur des Fenecs, a longtemps été attentif sur ses performances malgré son discours de juin dernier: « Vous me parlez des joueurs qui veulent éventuellement changer de nationalité. Je n’ai rien contre eux, mais ce serait indécent pour moi de faire des calculs sur des joueurs qui ne sont pas algériens. Je n’ai même pas envie de perdre mon temps à réfléchir sur leur situation. »
Au père d’Amine Gouiri de répondre: « Concernant la sélection, je laisse le choix à Amine. Je suis là pour l’accompagner, on en parle, mais c’est lui qui fait ses choix de carrière. C’est lui qui joue au football, c’est lui qui transpire et c’est donc lui qui prendra sa décision. Il ne faut pas le perturber. » Ce dimanche, dans le 101e derby de la Côte d’Azur en Ligue 1, face à Monaco, Amine Gouiri aura une nouvelle fois l’occasion de briller. Privés de stade, les fans de l’OGC Nice suivront le match de leur nouveau chouchou derrière les écrans ou les postes de radio tout comme un homme, qui garde un œil sur le jeune attaquant, un certain Didier Deschamps.
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