« Au lieu de faire dix passes, on en faisait trois. Mais pas n’importe lesquelles. » Jean-Claude Suaudeau ne peut pas mieux résumer le jeu du FC Nantes au milieu des années 90. Aux commandes d’une équipe de jeunes (23 ans de moyenne d’âge), dont la moitié sont issus du centre de formation, l’entraîneur de ce qu’on appelle alors le FC Nantes Atlantique (FCNA) guide son équipe au sommet du championnat. Exit le PSG de Ginola, Raï et Weah. Lors de la saison 1994-1995, Pédros, Loko, Makelele, Ouédec et N’Doram montent sur le toit du championnat après avoir marché sur tous leurs adversaires, sauf un, Strasbourg. 

Pedros: « L’impression que c’était plus facile chez les pros »

Le 15 avril 1995, après 32 matchs sans défaite, Nantes tombe pour la seule et unique fois de la saison sur la pelouse du Racing de Frank Leboeuf, buteur ce soir-là (2-0). Depuis, même l’omnipotent PSG version Qatar n’a jamais réussi un tel exploit. « Cette saison est passée à 2.000 à l’heure, témoigne Reynald Pédros sur RMC. J’avais l’impression de m’amuser tout en travaillant. C’est vrai que le record est exceptionnel mais avec le recul, cette génération a bossé 5-6 ans au centre de formation avec Raynald Denoueix. Avec Suadeau, c’était le prolongement, il n’y avait pas de cassure. J’avais l’impression que c’était plus facile chez les pros. »

Japhet Ndoram ICON – Japhet Ndoram

Avec un tarif maison de 3-0 à la Beaujoire, et une présence au sommet à tous les tableaux d’honneurs (meilleure attaque, meilleure défense, meilleur buteur avec Patrice Loko), le FC Nantes version 1995 est perçu comme l’un des plus flamboyants de l’histoire. Le jeu, les passes, les buts, tout va vite. Très vite. A l’image des deux victoires face au champion sortant, le PSG de Luis Fernandez, il était pratiquement impossible de résister au jeu collectif des Canaris. Personne n’a oublié le une-deux aérien Loko-Pédros face aux Parisiens. « Ce but me fait penser à notre travail dans la fosse, à la Jonelière, note le gaucher. C’est un espace fermé avec des grillages où le ballon ne sortait jamais. Il fallait toujours resté concentré. »

« Suaudeau nous disait toujours: ‘Si tu viens dans mon bureau, faut que t’aies des bons arguments' »

Le secret de la réussite de cette insolente bande de gamins, c’est aussi la méthode de leur coach. Un entraîneur autant admiré par sa science du jeu que craint quand on était convoqué dans son bureau. « Soit on avait fait une connerie, soit il nous parlait du match, se souvient Pédros. Il te faisait comprendre que tu n’étais pas le plus important. Que le plus important, c’est le collectif. Il nous disait toujours: « Si tu viens dans mon bureau, faut que t’aies des bons arguments. »

Pedros face à Dumas ICON – Pedros face à Dumas

La passe et la vitesse, l’ADN du club

Avec Coco Suaudeau, les joueurs ont droit à des entraînements sans ballon, les yeux bandés ou à quatre couleurs de chasubles au lieu de deux. Arrivé deux ans plus tôt, le grand frère du groupe, Serge Le Dizet, 30 ans à l’époque, est immédiatement impressionné par « la qualité des entraînements. » Idem pour Dominique Casagrande qui découvre en 1994 « une équipe de fous » et un coach exigeant. « Suaudeau me disait : ‘Ton souci, c’est de leur donner le ballon vite’. » La passe et la vitesse, l’ADN du club (à l’époque). « Parfois, à l’entraînement, il me mettait sur le côté et me disait : ‘Regarde comment ils font.' »

Ouédec : « Avec Loko, on n’avait plus besoin de se parler » 

Il y a 25 ans, l’école nantaise et surtout son jeu ne sont pas encore qu’un vague souvenir. « Le fait d’avoir grandi ensemble, tout semblait simple, note Nicolas Ouédec. On se connaissait parfaitement. On comprenait le jeu de notre partenaire, on savait où il allait aller. J’ai passé sept saisons avec Patrice (Loko), ça fait des paquets d’heures d’entraînement et de matchs. On n’avait plus besoin de se parler. » Une complicité et une complémentarité tellement fortes qu’ils seront peu nombreux à voler aussi haut après le titre de 1995. « J’ai eu du mal à retrouver les mêmes sensations au niveau du jeu », reconnait l’ancien avant-centre. N’empêche, ça valait vraiment le coup d’être vécu… 

https://rmcsport.bfmtv.com/football/nantes-1995-les-secrets-de-la-saison-record-des-canaris-1906240.html

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