Attaquant de l’AS Nancy Lorraine et 4e meilleur buteur de Ligue 2, Mickael Biron raconte son parcours si atypique.
Il y a un an, Mickael Biron n’avait pas de contrat professionnel. Il y a trois ans il jouait encore en Régional 1 martiniquaise. Aujourd’hui il fait les beaux jours de l’As Nancy Lorraine. Avec douze buts pour sa première saison en professionnel, le Martiniquais savoure après un parcours chaotique. De la précarité du championnat amateur suisse, au quart de finale de Coupe de France avec Epinal, en passant par une Gold Cup avec son île, Mickael Biron a 23 ans et déjà connu plusieurs carrières en une. Il se confie sur son parcours, son adaptation au niveau professionnel et le football martiniquais.
Il y a trois ans vous jouiez en R1 martiniquaise, aujourd’hui vous êtes parmi les meilleurs buteurs de Ligue 2, vous vous attendiez à une telle explosion?
Non je ne m’attendais pas du tout à ça. Je suis déjà très content d’arriver jusque-là. C’était difficile d’arriver jusqu‘en professionnel. Mais passer pro n’était qu’une étape, j’ai beaucoup travaillé pour en arriver là et être parmi les meilleurs buteurs du championnat.
Après votre mauvaise expérience en Suisse (un agent lui a pris de l’argent le laissant avec une licence amateur), vous avez hésité à abandonner le football?
Oui je ne voulais jouer que dans ma petite île en Martinique, je ne voulais pas repartir. Juste jouer avec mes amis. Je me suis installé dans une entreprise où un de mes amis était responsable, j’ai passé une formation et j’ai été embauché pour réparer des climatiseurs. Pour moi, mon avenir était là-dedans pas dans le football.
Finalement, un but en Coupe de France contre Epinal (édition 2018-2019) va changer votre vie ?
Je jouais avec mon équipe, le « Golden-Lion » (Golden Lion de Saint-Joseph, ndlr) au 7e tour de la Coupe contre Epinal. Je marque dans le match et derrière le coach d’Epinal m’appelle. J’ai beaucoup hésité à cause de ce qui s’était passé en Suisse. Finalement j’ai rejoint le club et je suis là aujourd’hui, donc oui ce but a changé ma vie.
Il y a des jours où vous avez encore du mal à vous persuader que c’est réel?
Oui il y a des matins quand je me lève ou quand il n’y a pas de matchs, je me dis que c’est quand même beau ce que j’ai fait.
La Coupe de France est donc une compétition importante pour vous …
Elle représente beaucoup! S’il n’y avait pas la Coupe de France en Martinique je ne sais pas si j’en serais là. Cette année j’ai beaucoup suivi le parcours du Club Franciscain, d’ailleurs avant de signer à Epinal je voulais rejoindre ce club. J’ai beaucoup d’amis qui jouent là-bas, ils m’ont dit « Ne t’inquiètes pas Micka on va faire le taff et on se jouera en France. »
« Il faut jouer et s’entrainer comme un pro »
Vous qui venez du football amateur, que pensez-vous de l’arrêt des compétitions?
Chez nous en Martinique, les compétitions n’ont pas été arrêtées, ça continue encore de jouer au football. C’est difficile pour les amateurs, ça ne va pas être le même football quand ça va reprendre. Ils ne savent même pas quand ils vont pouvoir rejouer, c’est dur pour ceux qui jouaient des montées. Pour moi ça s’est arrêté au mauvais moment.
A 23 ans c’est votre première saison au niveau professionnel, qu’est ce qui demande le plus d’adaptation par rapport au niveau amateur?
L’adaptation se fait d’abord au niveau technique, au niveau de l’endurance. On m’avait dit que ça allait être difficile au début. Il faut aussi s’adapter avec les joueurs qui ont plus d’expérience au niveau professionnel. Il faut jouer et s’entrainer comme un pro.
Vous vous êtes appuyés sur vos coéquipiers?
Beaucoup de gens, beaucoup d’amis dans le milieu pro m’ont dit ce qu’il fallait faire pour rester. On m’a dit: « Micka, quand tu seras dans le milieu il y a beaucoup de choses que tu dois travailler, beaucoup de choses où tu dois progresser. » C’est important de s’appuyer sur les gens qui ont l’expérience, qui savent ce que c’est d’être pro.
Le coach (Jean-Louis Garcia) a un rôle important dans cette progression?
Oui on a une très bonne relation, une relation « tranquille ». Il me donne beaucoup de bons conseils, à l’entrainement il est derrière moi à me dire « Micka fait ci, fait ça, améliore-toi dans ça ». Il m’a appris beaucoup de choses. On fait une bonne saison avec Nancy, même si, bien sûr on aurait pu faire mieux. C’est dommage car on ne retrouve notre football que maintenant. (Au 17 mars, Nancy est 9e au classement de Ligue 2 et reste sur quatre victoires lors des cinq derniers matchs, NDLR).
« Je n’ai pas envie qu’on nous gâche le football martiniquais »
Durant votre riche début de carrière, vous avez également joué la Gold Cup avec la Martinique (compétition organisée par la Concacaf), c’était important pour vous de représenter votre île?
Bien sûr c’est important, c’est là que j’ai grandi, je trouve ça important de jouer pour son île. Je pense qu’il faudrait plus de compétitions internationales pour la Martinique. On a beaucoup de jeunes qui savent jouer au foot mais comme on n’est pas très connus, on a du mal à se développer. On donne tout à la Gold Cup pour qu’on nous voit. Nous les pros on essaie de parler de la Martinique pour essayer de faire percer un maximum de joueurs.
Vous avez ce rôle d’ambassadeur?
Oui bien sûr, je prends ce rôle à cœur. Je n’ai pas envie qu’on nous gâche le football martiniquais, comme je l’ai dit on a beaucoup de jeunes qui savent jouer, mais on nous voit pas comme des gros clubs. En plus il y a souvent des équipes de Martinique qui vont loin en Coupe de France. Il faudrait plus de détections, que des équipes de Ligue 1 viennent en Martinique voir les clubs jouer. En ce moment c’est difficile avec le covid, mais je vais en parler avec le directeur sportif (Paul Fischer) pour qu’il vienne en Martinique (rires).
En trois ans vous êtes passés de R1 à la Ligue 2, vous vous voyez où dans trois ans?
D’ici trois ans, je me vois en Angleterre, c’est mon rêve. Je n’ai pas forcément de clubs en tête mais juste jouer en Premier League. J’aime l’ambiance, voir des stades pleins, le niveau élevé. Le football anglais est complètement différent, c’est un championnat difficile mais ça me plait. Et puis au niveau de la météo je ne serais pas trop dépaysé de Nancy (rires). Jouer la Ligue des champions d’ici trois ans ça serait pas mal aussi.
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