Dans une lettre adressée ce dimanche à des parlementaires, Jean-Michel Aulas réitère son mécontentement face à l’arrêt définitif de la Ligue 1 et demande à revenir sur cette décision. Selon lui, en restant sur cette position, les clubs professionnels pourraient perdre jusqu’à 900 millions d’euros et conduirait à un « naufrage économique ».
Mais cette estimation est-elle fondée et justifiée ou ne répondrait-elle qu’à un seul et même objectif: celui de permettre à Lyon de finir la saison et espérer se qualifier en coupe d’Europe. Car, en regardant les autres estimations réalisées par d’autres observateurs du foot, on ne peut que nuancer l’inquiétude du dirigeant lyonnais.
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Des estimations loin des 900 millions d’euros
Par exemple, selon l’UNFP, le syndicat des joueurs, qui avait produit une étude d’impact en tout début de confinement, avant l’arrêt officiel et définitif de la saison, le coût d’une annulation du championnat couterait 383 millions d’euros minimum et jusqu’à 500 millions d’euros en rajoutant les coûts indirects et induits potentiels.
L’analyse de l’UNFP avait intégré les effets provoqués sur les droits TV, les recettes billetterie ainsi que sur les revenus commerciaux, issus du sponsoring, du marketing et du merchandising. Nous sommes donc très loin des 900 millions affichés par Aulas, avec 400 à 517 millions d’euros d’écart.
Alors certains pourraient rétorquer qu’il faut aussi rajouter l’impact des transferts et sur la compétitivité. En ne terminant pas la saison, les joueurs de l’hexagone perdent en valeur marchande et altèrent le niveau de jeu global et la réputation du championnat de France. Effectivement, une étude du Centre International d’Economie du Sport avait calculé que la crise du coronavirus avait provoqué une baisse moyenne de 28% des effectifs de Ligue 1, avec notamment -38% pour l’Olympique de Marseille.
Or, si on répercute cette baisse sur le bilan net des transferts des équipes françaises, 772 millions d’euros en 2019, on se retrouve avec un manque à gagner de 216 millions d’euros. Soit, en intégrant toutes les pertes, un coût total de 432 millions d’euros et jusqu’à 716 millions d’euros maximum. Pas les 900 millions d’euros inquiétants et alarmants.
Si les autres championnats finissent, c’est aussi bien pour la France
De même, les propos de Jean-Michel Aulas pourraient encore être amoindris en supposant que la reprise des autres championnats majeurs permettrait d’atténuer l’effet sur les transferts français. C’est effectivement ce qu’admet Bernard Caïazzo, président de l’AS Saint-Etienne et grand rival de l’OL. Selon lui, si l’Angleterre, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie reprennent, cela leur permettra d’assurer leur trésorerie et ainsi disposer de suffisamment de fonds pour pouvoir être actifs sur le marché des transferts, notamment à destination de la France.
Autre élément, et non des moindres, Aulas s’inquiète d’un risque de faillite du football français. Or, malgré l’arrêt officialisé, il convient de rappeler que les clubs ont assuré leur comptabilité via un prêt garanti d’Etat obtenu par la Ligue. Ce soutien en trésorerie, qu’il faudra forcément rembourser, leur permettra de payer les salaires des joueurs et l’ensemble des charges et des traites. Pour l’instant, les équipes sont sauvées.
L’économie peut aussi s’écrouler, reprise ou pas
Pour l’instant, parce que rien ne dit que la saison prochaine, reprise ou non, l’économie du football ne puisse pas être bouleversée en cas de maintien de l’épidémie. Selon une étude commandée par l’ECA, l’association européenne des clubs, un prolongement de la crise sanitaire, avec des stades à huis-clos sur toute la saison 2020-21, pourrait coûter jusqu’à 4 milliard d’euros.
Donc la question n’est pas de savoir s’il faut finir, la question est de savoir comment le football européen, dans son intégralité, peut être sauvé. C’est à échelon global qu’il faut raisonner, pour le sport dans son intégralité, pour l’économie dans son ensemble, et pas seulement penser à sa propre personne…
https://rmcsport.bfmtv.com/football/ligue-1-un-naufrage-economique-va-t-il-arriver-comme-le-craint-aulas-1915979.html