Une question géographique évidemment
Derrière le derby azuréen Nice-Monaco, celui entre Nîmes et Montpellier est le plus proche géographiquement (56 kilomètres séparent les deux villes, contre 62 entre Lyon et Saint-Etienne). Ce qui ne rapproche pas pour autant les deux villes dont les départements sont séparés par Le Vidourle, fleuve qui sert de frontière entre l’Hérault et le Gard. Capitale du Languedoc-Roussillon et 8e ville la plus peuplée de France, Montpellier (275.000 habitants) est aussi le pole économique de la région et fait de l’ombre à Nîmes (150.000 habitants), cité antique, plus ouvrière et passionnelle où l’amour du football ne se partage qu’avec la féria quand il est éclaté entre le rugby et le handball chez le voisin héraultais. Ancien grand club français dans les années 1960, le Nîmes Olympique a vécu avec une forme de jalousie l’émergence du jeune voisin montpelliérain créé en 1974 et qui n’a cessé de croître en même temps que le NO déclinait.
Une haine féroce entre supporters
Si les deux clubs se titillent tout en se respectant, les supporters se vouent une haine viscérale. Cette première rencontre dans l’élite pour la première fois depuis 25 ans est attendue de pied ferme par les deux camps. Les Gladiators, groupe nîmois, ont passé plus de temps à insulter les Montpelliérains, mercredi face à Guingamp (0-0), qu’à encourager leur équipe. Les supporters du MHSC prévoient de se rendre au centre d’entrainement à la veille du match pour motiver les troupes.
Les antécédents entre les deux camps sont nombreux et violents. En fin d’année 2017, alors que les deux équipes jouaient en Bretagne, les supporters héraultais étaient tombés sur le convoi nîmois qu’ils avaient détruit en s’emparant de leur bâche extérieure. La vengeance avait sonné quelques mois plus tard quand le local de la Butte Paillade avait été vandalisé avec vol de la bâche « domicile » à la clé. Un affront qui avait poussé l’association montpelliéraine à se dissoudre. Une nouvelle a été créée, avec de nouveaux locaux et une nouvelle bâche qui devrait être inaugurée dimanche.
Avant cela, les équipes s’étaient déjà retrouvées en Ligue 2 en 200-01 et 2008-09. Lors de cette dernière saison, Laurent Nicollin, alors président délégué de Montpellier, avait envoyé un message très insultant envers les Nimois au vice-président d’une association de supporters du club pour lui assurer de la motivation des joueurs deux jours avant le match. Des supporters montpelliérains s’étaient ensuite rendus à Nîmes pour saccager le local des fans adverses, engendrant une grosse bagarre et 26 interpellations qui avaient permis à la justice de retrouver ce SMS.
Louis Nicollin aimait jeter de l’huile sur le feu
Il aurait assurément adoré assister à cette rencontre. Mais Louis Nicollin, président fondateur et emblématique de Montpellier, s’est éteint le 27 juin 2017… à Nîmes, une ville qu’il adorait charrier. « Loulou » jouait souvent sur la corde sensible avec le voisin même s’il savait y piocher les bons éléments à l’instar de Michel Mézy, fidèle parmi les fidèles du MHSC, après avoir joué et entrainé à Nîmes. Le président s’était un jour félicité du succès populaire de son équipe.
« On a fait mieux que Michel Sardou au Zénith, 18000 spectateurs pour une ville qui n’aime pas le football, pour un président qui est un peu con, pour un entraîneur qui achète les matchs, pour un directeur sportif qui est nîmois… » Après les inondations qui avaient touché Montpellier et La Mosson en 2014, il était aussi prêt à jouer aux Costières. « J’aurais préféré jouer à Nîmes (plutôt qu’à l’Altrad Stadium, ndlr) mais le préfet s’y est opposé pour des raisons de sécurité. » Chambreur mais pragmatique le Loulou.
Le match le plus fou qui avait valu une chanson à la gloire de Nicollin
La rivalité entre les deux clubs est aussi nourrie d’un match historique le 14 avril 1996. Alors en National, Nîmes avait créé l’exploit en s’imposant face à Montpellier (1-0) en demi-finale de la Coupe de France. Les Crocos s’étaient qualifiés pour la finale qu’ils avaient perdue face à Auxerre (2-1), champion de France cette année. Avant la rencontre, Louis Nicollin, président du MHSC, avait prévenu ses ouailles. « Si on perd à Nîmes, je rentre à cheval », avait-il déclaré. Cela avait inspiré le groupe Les Ricounes qui avait écrit une chanson à la gloire de cette déclaration.
Un déplacement sous très haute sécurité
En autorisant le déplacement de 605 supporters nîmois, la préfecture de l’Hérault garantit une ambiance énorme à La Mosson qui sera à guichets fermés dimanche. Compte tenu de la rivalité et des antécédents entre les deux équipes, le match est classé à haut-risque. 10 ou 11 bus partiront des Costières et seront escortés jusqu’à la Mosson. Un hélicoptère pourrait ouvrir le convoi puisque des supporters de la Butte envisagent de se positionner sur les ponts pour viser les bus. Les supporters nîmois ont l’interdiction de se rendre ailleurs qu’au stade entre 12h et minuit afin d’éviter des affrontements en ville.
Aucun signe de Nîmes ne sera autorisé dans le stade hormis dans le parcage. Ni casquette, ni maillot ne seront autorisés dans le stade sous peine d’être en infraction avec l’arrêté préfectoral. Les supporters qui voudront braver l’interdit ne seront pas autorisés à entrer dans le stade et pourront faire l’objet d’une interdiction administrative de stade. Dans le stade, on pourrait compter 3000 supporters nîmois qui ont acheté leur place sur le web quand le club de Montpellier a mis en place la billetterie. Entre 600 et 1200 policiers devraient être mobilisés sur la rencontre.
Ils ont fait les beaux jours de l’ennemi
Malgré leur rivalité, la proximité géographique des deux villes a souvent permis le passage de joueurs chez l’ennemi comme Michel Mézy, emblématique entraineur des deux clubs, qui a apporté le premier titre à Montpellier (la Coupe de France en 1990) ou Eric Cantona, qui avait davantage brillé avec le MHSC (14 buts en 1989-90) qu’à Nîmes qu’il avait rejoint la saison suivante (4 buts en 1991). Il y eut surtout Kader Firoud, légende de Nîmes qui avait fait monter Montpellier en 1981, et René Girard, formé dans la cité gardoise où il a joué et entrainé avant de devenir l’entraineur du titre de champion de France de Montpellier en 2012.
Avant cela Laurent Blanc, formé à Montpellier dont il est toujours le meilleur buteur de l’histoire (84), était passé par Nîmes. Il avait d’ailleurs participé à la dernière rencontre entre les deux équipes en L1 dans le camp gardois. Ce jour-là, Michel Der Zakarian, aujourd’hui entraineur de Montpellier, avait inscrit l’unique but de la rencontre.
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