C’est un sujet qui fait déjà l’objet de nombreux débats dans les vestiaires de l’Hexagone. Mais il va être mis sur la table de manière officielle. L’UNFP, le syndicat des joueurs professionnels, a rendez-vous ce mardi à 14h avec plusieurs présidents de clubs de Ligue 1 et Ligue 2. Au menu des discussions: la baisse des salaires des joueurs. La crise sanitaire liée au Covid-19 et le fiasco des droits TV entraîné par Mediapro ont sérieusement affaibli les finances du foot français. A la mi-saison, les caisses des clubs sonnent dangereusement creux. De quoi s’inquiéter pour la survie de certaines équipes. « Si on ne diminue pas les charges, il n’y aura pas de miracle, prévient dans Le Monde Jean-Pierre Caillot, le président du Stade de Reims. Il y aura d’un côté les clubs avec des actionnaires puissants qui auront la trésorerie, puis de l’autre, 60% à 70% des clubs qui n’en auront pas la capacité ».
Le dirigeant rémois fait partie de la délégation de présidents qui va s’assoir à la table de l’UNFP, en compagnie de Jean-Michel Aulas (Lyon), Marc Keller (Strasbourg), Loïc Féry (Lorient) et Christian Leca (AC Ajaccio, L2). Dans le but d’obtenir un accord cadre sur la question de la rémunération des joueurs. Sujet particulièrement sensible. La masse salariale représente la ligne la plus épaisse dans les comptes des clubs français. Les salaires des joueurs de Ligue 1 atteignaient au total 780 millions d’euros lors de la saison 2018-2019, selon la DNCG (1,58 milliard en prenant en compte les cotisations sociales). Il va falloir réduire la voilure pour compenser les pertes et retrouver un équilibre financier.
« Si les clubs déposent le bilan, les joueurs seront au chômage »
« Il faut d’abord trouver ce que l’on pourrait appeler ailleurs un accord de branche, explique Caillot. Les gens de l’UNFP vivent sur la même planète. Ils savent la problématique des salaires dans les comptes d’exploitation des clubs. Le football est un secteur particulier, avec une inflation des salaires assez exceptionnelle depuis dix ans (…) Si les entreprises déposent le bilan, les joueurs seront au chômage et pour le coup, on connaît le maximum de l’indemnisation qui est très éloigné de la rémunération moyenne d’un footballeur. »
Ces derniers jours, les membres de l’UNFP ont enchaîné les réunions sur le sujet. Selon nos informations, une partie d’entre eux adopte une position très ferme: les footballeurs doivent faire un effort. L’autre partie veut réaliser un vaste audit auprès des joueurs. Des échanges ont déjà eu lieu entre l’UNFP et certains pros en crampons. La plupart des acteurs de Ligue 1 interrogés se disent ouverts à un dialogue, si leur club rencontre des difficultés à les payer en temps voulu. En Ligue 2, en revanche, la porte semble plus fermée. Certains joueurs, qui touchent nettement moins que dans l’élite, sont clairement opposés à un allégement de leur fiche de paie.
Un accord collectif impossible à mettre en place
Dans ce contexte, l’UNFP va proposer aux présidents de clubs de trouver des solutions. Mais pas dans un cadre collectif, sachant que chaque club et chaque joueur rencontre des problèmes différents. Le syndicat peut jouer un rôle de médiateur auprès des joueurs et appuyer, si besoin, les craintes légitimes de certains clubs. En confirmant des informations chiffrées et en conseillant les footballeurs en fonction de leur situation. L’idée est d’ouvrir un vrai dialogue social. Et, si possible, d’officialiser des accords entre clubs et joueurs, comme le Barça a pu le faire en Espagne. Au printemps dernier, une discussion similaire avait abouti à un accord-cadre pour reporter une partie des salaires lors de l’arrêt anticipé de la saison. Mais les choses ont depuis empiré et l’effort devra être plus important cette fois.
Reste à savoir combien de footballeurs seront d’accord pour voir leurs revenus diminuer. « Il y aura toujours des récalcitrants, mais ils seront aussi nombreux à prendre rapidement position pour sauver des emplois », veut croire Jean-Pierre Caillot. Certains pensionnaires de L1, comme le Niçois Amine Gouiri, ont déjà glissé qu’ils étaient prêts à « faire preuve de solidarité ». « S’il faut passer par là pour que le foot français reparte de l’avant, pour ma part, il faudra le faire », a confié à l’AFP Brendan Chardonnet, le défenseur de Brest.
Une solution de dernier recours pour certains clubs
Mais dans certaines villes, les dents grincent déjà à l’heure de remettre les comptes à plat. « Les dirigeants ont failli. A eux de trouver d’autres solutions », a pesté vendredi Frédéric Antonetti. L’entraîneur de Metz redoute la concurrence des clubs européens sur le marché des transferts, qui pourrait entraîner la fuite des talents. « Si on lui offre plus, le joueur ira ailleurs. Cela va nous affaiblir encore plus », alerte-t-il.
A Rennes, Brest et Angers, on explique ne pas avoir encore ouvert concrètement la discussion sur la baisse des salaires. Ça reste pour l’instant une solution de dernier recours. Les dirigeants veulent d’abord savoir exactement quelles seront leurs pertes, mais également le montant du nouveau contrat des droits TV, que pourrait signer Canal +. En attendant, on cherche les économies ailleurs. A Angers, Philippe Caillot, le président délégué, souhaite baisser en urgence la masse salariale, en vendant des joueurs dès cet hiver. Principalement ceux qui ne jouent pas ou peu, afin de limiter le risque sportif. Mais il y a un vrai doute sur la capacité à trouver des acheteurs, car tous les clubs souffrent actuellement de la crise du Covid-19.
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