Ce lundi, l’UNFP a dévoilé que la majorité des footballeurs de Ligue 1 et de Ligue 2 refusaient de reprendre la saison si les inquiétudes sanitaires étaient maintenues. Autrement dit, malgré la volonté et l’espoir des dirigeants de terminer coûte que coûte le championnat, tant pour toucher les droits TV que pour respecter l’équité sportive, rien ne dit que le sport reprendra comme prévu.
En effet, bien que les dates du 17 juin et du 25 juillet aient été inscrites par la LFP, depuis cette annonce, il n’y a plus aucune certitude. Alors, une nouvelle proposition est revenue sur le devant de la scène: si le coronavirus est encore présent en mai, pourquoi ne pas décaler encore plus la saison et reprendre en septembre, jusqu’à la fin de l’automne?
Même Christophe Dugarry, sur les antennes de RMC, défend cette idée. Elle permettrait, à la fois, de rassurer les joueurs, de gérer l’inquiétude sanitaire, d’optimiser la réathlétisation et la préparation physique, de finir normalement le championnat, d’espérer des enceintes remplies avec les supporters et enfin de se caler sur le calendrier de la prochaine coupe du Monde au Qatar, jouée en décembre 2022.
Mais cette idée est-elle vraiment viable et possible? C’est toute la question.
? »C’est une bonne idée, mais elle est impossible »@Lasciencedufoot explique en trois points pourquoi l’option de reprise de la L1 défendue par Duga avec une fin de saison en 2020 et une nouvelle saison en 2021 n’est pas réaliste et viable économiquement. pic.twitter.com/Ctpm19sTO5
— Team Duga (@TeamDugaRMC) April 16, 2020
Juridiquement, économiquement, cela semble compliqué
Premièrement, la loi actuelle la rend caduque. Selon l’article L222-2-4 en droit du sport, « la durée d’une saison sportive est fixée à douze mois », pas 16 mois si elle devait être étalée d’août 2019 à décembre 2020. Il faudrait alors changer la loi, de façon accélérée, afin de permettre qu’une année sportive puisse dépasser le stade fatidique des 365 jours.
Néanmoins, ça ne sera pas la seule chose à changer juridiquement. L’une des épineuses questions reste celle des contrats. En droit du sport, il est stipulé que « la durée d’un contrat de travail mentionné à l’article L. 222-2-3 ne peut être inférieure à la durée d’une saison sportive fixée à douze mois ».
Or, quid de tous les joueurs qui vont voir leur contrat s’arrêter au 30 juin 2020? Certains parlent d’un avenant permettant de le prolonger jusqu’à la fin officielle de la saison. Mais deux problématiques se posent: soit le droit du sport interdit des contrats inférieurs à 12 mois et les équipes seront obligées de prolonger d’au moins 1 an tous les joueurs en fin de contrat, soit la loi change et les équipes peuvent prolonger sur la seule nouvelle durée de la saison.
Mais dans les deux cas, c’est la comptabilité qui est altérée. Les clubs n’ayant pas anticipé la prolongation de la masse salariale, ils risqueront donc d’entamer leurs réserves déjà lourdement impactées par la crise économique.
Il faut que ça passe par l’Europe
Autre problème: la question de l’harmonisation européenne et de la gestion du mercato. Il est évident que la solution d’une saison étalée jusqu’à décembre devra être choisie par l’ensemble des 55 fédérations européennes et validée par l’UEFA. La France ne pourra pas être la seule à bouleverser son calendrier.
Ensuite, comment organiser le mercato si la saison devait reprendre en septembre? Les clubs, notamment les français qui basent leur économie essentiellement sur le trading, pourront-ils prendre le risque d’altérer le niveau de leur équipe, en se séparant de leurs meilleurs éléments, alors que la saison ne sera pas encore achevée?
Et les diffuseurs?
Enfin, dernière difficulté, les droits TV. Si la saison 2019-2020 s’achève, les diffuseurs s’acquitteront du dernier versement, pour l’instant bloqué, des droits de retransmission. Mais quid de Médiapro et de ses 800 millions d’euros par an s’il faut décaler la saison prochaine à janvier voire février 2021, soit 6 mois de retard.
Le groupe espagnol pourrait demander des dédommagements pour non-respect des accords du contrat, voire exiger une renégociation à la baisse. Ce qui serait une nouvelle épine dans le pied fragilisé des clubs.
Il n’est donc pas encore dit que l’année sportive s’arrêtera en décembre.
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