Montpellier reçoit Bordeaux dimanche (15h, 30e journée de Ligue 1) pour garder le contact avec l’Europe. A quatre points de Marseille, qui se déplacera à la Mosson le 11 avril prochain, la Paillade doit valider son point ramené de Nîmes lors du derby par un succès contre les Girondins. Invaincu depuis 9 matches, Michel Der Zakarian peut compter sur ses hommes forts que sont Delort, Laborde, Savanier ou Mollet. Et depuis quelques semaines, il a une nouvelle arme offensive : Elye Wahi qui confirme à chaque sortie son énorme potentiel.
Avant de s’imposer sur les terrains (3 buts entre janvier et février), le nom d’Elye Wahi, 18 ans depuis le 2 janvier, s’est imposé en conférence de presse d’avant-match bien avant ses premières minutes sous le maillot de Montpellier. Il faut dire que cela faisait longtemps qu’un jeune du centre de formation n’avait pas autant fait parler de lui. Il faut remonter à 2009. René Girard, nouvel entraîneur de Montpellier, titularisa Younes Belhanda, âgé de 18 ans, contre le PSG, pour le premier match de la saison. Le jeune milieu de terrain venait de remporter la Gambardella avec la génération 90 (Cabella, Stambouli ou Martin).
Et parmi cette génération dorée, Belhanda était celui qui sortait du lot, celui qui réalisait des promesses chaque week-end. Wahi est dans cette veine-là. Ses exploits en jeune sont légions. Quand le franco-ivoirien, fan de Drogba, arrive à Caen, en 2014, il marque 89 buts en une saison avec les U15. L’année suivante, alors qu’il est surclassé en U17 à seulement 14 ans, il marque un doublé en amical contre le PSG. La même année, il termine meilleur buteur (9 réalisations) de la Vinci Cup (tournoi international des moins de 15 ans). Frédéric Garny, son entraîneur en jeune à Montpellier, se souvient de son dernier match : « C’était contre Toulouse en U19. A la mi-temps, il est rentré et il a dit coach, je vais mettre deux buts et il a mis deux buts. Il était capable de faire des choses extraordinaires, de prendre le match en main, il a des qualités exceptionnelles et une vraie confiance en lui. »
Problème de comportement
Né dans l’Essonne, à Courcouronnes en 2003, Wahi a grandi en région parisienne où il a découvert le foot. A 6 ans, il signe sa première licence au JS Suresnes, club où a évolué N’Golo Kanté. En 2016, Pierre Ville, dirigeant de la JS, amène Wahi en détection à Caen. Francis De Taddeo, responsable du centre de formation de Caen à l’époque, se souvient : « En une journée on a été convaincu de son énorme potentiel. C’est d’abord l’histoire d’une belle relation. C’était un garçon lumineux, travailleur, qui avait envie, on sentait qu’il avait la passion dans les yeux. On fait un gros travail de base, on a travaillé tous les leviers de performance. Et au bout de 18 mois, on a vu quelque chose apparaître. Il n’est pas très commun comme garçon, il a de la classe. » Mais son histoire avec le Stade Malherbe se termine mal. Suite à des problèmes de comportement au collège, Francis De Taddeo est obligé de le renvoyer.
Faux départ pour l’Angleterre
Suivi par des grands clubs (Liverpool, Tottenham, Southampton, Manchester City, Manchester United ou la Juventus Turin), des agents mal intentionnés voient en Wahi un moyen de s’enrichir en l’envoyant Outre-Manche. À l’été 2018, le jeune buteur signe un précontrat avec le club anglais de Southampton. Mais comme il n’a pas encore 16 ans, il ne peut pas quitter l’hexagone.
Le FC Montfermeil lui offre une licence d’un an avant de pouvoir l’envoyer en Premier League contre une compensation financière de 30.000€ promise par les Saints. Francis De Taddeo, qui a rejoint le centre de formation de Montpellier entre temps, reprend contact avec la famille: « Même si nos chemins se sont écartés, on n’était pas en mauvais terme. Comme je ne voyais pas d’actualité sur lui, je me suis dit il n’a pas signé en Angleterre. J’ai repris contact avec la famille et les parents ont dit ‘ok on réfléchit’. Deux jours après, ils ont rappelé pour dire ok. » Et après un bras de fer juridique, la LFP donne raison à Montpellier dans le combat entrepris par Montfermeil. Wahi signe donc un contrat aspirant en août 2018 avec Montpellier.
Un gamin pétillant
Depuis, tout s’enchaîne très vite pour Wahi. Un premier contrat professionnel en octobre 2019 à seulement 16 ans, une première pour le club. Une prolongation l’été suivant, ses premières minutes en professionnel en décembre contre Metz, son premier but en janvier contre Monaco. Un autre contre Lens, une titularisation en coupe de France, une prolongation dans l’Hérault jusqu’à juin 2025 et dans la foulée le but de la victoire à Lyon.
Et cela à tout juste 18 ans. Der Zakarian, qui cherche toujours à protéger ses jeunes joueurs, n’avait pu s’empêcher d’être élogieux le soir de Lyon : « C’est un gamin qui est pétillant, qui arrivé dans le milieu pro il est tout frais il a envie de montrer son talent et de belle manière. Il me surprend. On voyait des qualités à l’entraînement. Mais c’est vrai que c’est étonnant. » Frédéric Garny n’est pas surpris de cette réussite: « Il a les qualités intrinsèques pour réussir, il a quelque chose d’innée. C’est le genre de joueur dont on ne peut pas analyser les dribbles, il est capable de gestes de grande classe. » Francis De Taddeo était persuadé aussi qu’il allait réussir: « Ce n’est pas une surprise, la seule question c’était quand. Il fallait acquérir de la maturité, prendre du temps car certains pensait que même à 16 ans il pouvait jouer avec les pros. Il est plus stable dans sa vie, dans son corps, dans son esprit. »
Première convocation en France U18
Puissant, athlétique, rapide, très bon dos au jeu, Wahi explose aussi grâce à sa passion du foot. « La différence par rapport aux autres, c’est que lui ne peut pas vivre sans football, insiste Frédéric Garny. Il se nourrit de football, il aime le football. Même quand il était en U19, on le retrouvait souvent derrière les grillages lors des matches des U15 ou U17. Il allait voir les matches de jeunes le week-end. »
Sentiment partagé par Francis De Taddeo: « Il a surtout une qualité que peu de joueurs de son âge a. C’est un passionné de football, il adore jouer au football. Il adore le jeu, il aime jouer avec les autres de manière intelligente et efficace. Ça se retrouve quand il est chez les pros, mais si vous faîtes un 4 contre 4 ou un city avec lui, ça sera le dernier à partir. Il aime ça. Beaucoup de gamins aiment le foot mais en pointillé : pas tous les jours, pas tout le temps et en tout cas pas huit heures par jour. Elye, lui, est branché 24/24 sur le foot. » Et dans cette année totalement folle, Wahi va lever une nouvelle barrière. Il vient d’être convoqué pour la première fois avec l’équipe de France U18.
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