Brest: Romain Faivre, le coup de coeur surprise de la Ligue 1

Lorsqu’une équipe de milieu de tableau de Ligue 1 se déplace au Parc des Princes, ses joueurs ont plus souvent tendance à y prendre une valise que de la valeur. Mais il faut croire que Romain Faivre ne fait rien comme les autres. Malgré la défaite de Brest contre le PSG samedi soir (3-0), la performance du milieu offensif de 22 ans a de nouveau été saluée par les observateurs, et ses partenaires. « C’est assez exceptionnel de voir jouer Romain, félicitait le portier Gautier Larsonneur dans les entrailles du Parc. Il va prendre de plus en plus d’ampleur. »

A l’image de Sven Botman (Lille), Sofiane Diop (Monaco), Adrien Truffert (Rennes), ou Pape Gueye (OM), Faivre est incontestablement l’une des révélations de la première partie de saison en France. Pas mal, pour un joueur acheté… 400.000 euros au mois de juillet.

Un parcours semé d’embûches

Comment expliquer que le Stade brestois ait déboursé aussi peu pour un joueur aussi performant (4 buts, 3 passes)? La réponse se trouve sûrement dans le parcours cabossé de l’intéressé. Alors oui, l’histoire du footballeur qui échoue durant sa formation, pour mieux rebondir et prendre sa revanche des années plus tard, ce n’est pas très original. Sauf que dans le cas de Faivre, les embûches se sont succédées.

Il y a eu Le Mans, d’abord. Le milieu, qui a grandi à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) et fait toutes ses classes au Racing, pense faire un premier pas vers le haut niveau dès 2013, lorsqu’il part pour le centre de formation du club sarthois. Problème: son arrivée coïncide avec la liquidation du Mans. Six mois plus tard, Faivre est de retour chez lui.

Il y a eu Tours, ensuite. Après l’échec manceau, le gaucher prend en 2014 la direction de l’Indre-et-Loire. Là-bas, ses formateurs louent le potentiel d’un garçon parfois « rebelle », mais très intéressant. Sauf que le contrat pro, officiellement à cause des difficultés financières du club, n’arrive jamais. En 2017, Faivre et ses proches se lassent. L’heure d’un nouveau départ.

Et donc, il y a eu Monaco. Le club du Rocher récupère gratuitement le joueur de 19 ans cette année-là. Faivre se distingue rapidement avec la N2, et signe un premier contrat professionnel en 2018. En octobre, Leonardo Jardim est remplacé par Thierry Henry. La porte s’ouvre, enfin. Le champion du monde 98 loue les qualités du jeune milieu et le garde dans le groupe pro. Mieux: il le lance en Coupe de la Ligue contre Lorient en décembre, puis contre Guingamp en Ligue 1 quelques jours plus tard, avant deux nouveaux matchs de coupe en janvier. Malheureusement, quelques semaines après, Henry s’en va, et surtout, Jardim revient. Faivre disparait instantanément du groupe pro, puis refuse un prêt au Cercle Bruges. Il jouera toute la saison 2019-2020 avec la réserve. Jusqu’à ce que Brest, déjà intéressé un an plus tôt, se manifeste de nouveau. Et le recrute pour une bouchée de pain.

Icon – Romain Faivre

Le Bretagne sous le charme de l’autre « Hatem »

Si Jardim ne lui a jamais fait confiance, Faivre a eu la chance de tomber en Bretagne sur un Olivier Dall’Oglio beaucoup plus ouvert. Dès la première journée de Ligue 1, le coach brestois n’hésite pas à titulariser contre Nîmes sa recrue, qui évoluait au quatrième échelon quelques mois plus tôt. Dès la deuxième, Faivre marque son premier but contre l’OM. Le début d’une belle histoire pour le sosie (non-officiel) d’un phénomène du foot français.

« A Monaco, il ne défendait pas, s’amusait dernièrement son ancien compère Jordy Gaspar dans les colonnes de France Football. C’était un milieu, un 8, pas un 10, et il fallait défendre. On se crêpait le chignon. Mais sinon, Romain, il a la classe, il était bon délire. Il y a des moments, sa tête tourne, et d’autres, il n’a pas envie de réfléchir. C’est un foufou. On l’appelait Hatem, en référence à Ben Arfa. Physiquement, il a la même tête. Niveau joueur, ils se ressemblent aussi. »

Si Faivre s’est permis depuis le début de la saison quelques gentilles provocations, à l’image de sa célébration contre Marseille, ce côté « foufou » n’a pas franchement sauté aux yeux. Le joueur, redoutable dribbleur, a sans doute muri, corrigé quelques lacunes dans son jeu et dans sa tête. « Un garçon comme Romain Faivre devient de plus en plus complet, ça devient intéressant, observait Dall’Oglio la semaine passée. Il est capable de caresser le ballon et de le porter haut. Il est très technique mais il a encore une marge de progression dans les derniers mètres. »

Toujours est-il que la Bretagne est déjà sous le charme. Selon le Télégramme, il a détrôné Irvin Cardona au classement des maillots les plus floqués dans la cité du Ponant. Et en décembre, Faivre a déjà signé une prolongation de contrat jusqu’en 2025.

AFP – Romain Faivre en équipe de France

Un gros transfert à venir?

Cela veut-il dire que l’ancien Monégasque va s’inscrire dans la durée chez les Ty Zefs? Probablement pas… S’il parvient à être régulier jusqu’à la fin de la saison, il se pourrait que les dirigeants bretons reçoivent quelques grosses offres à son sujet. Du genre de celles que l’on ne refuse pas. Selon Transfermarkt, Romain Faivre est aujourd’hui évalué à 8 millions d’euros. Il aurait donc multiplié sa valeur par 20 depuis l’été dernier. Et même si la crise est passée par-là, l’estimation pourrait encore grimper dans les prochains mois, au gré de ses prestations en Ligue 1, mais aussi sur la scène internationale.

Car Faivre n’a pas brillé uniquement avec le maillot brestois. Appelé par Sylvain Ripoll en équipe de France Espoirs début octobre, le dribbleur du 92 – dont la mère est algérienne – a enchaîné quatre rencontres avec les Bleuets, pour deux buts, et peut logiquement prétendre à une place pour le prochain Euro U21 au printemps. Un terrain de chasse privilégié pour les scouts du continent.

Et lui, qu’en pense-t-il? « En fait, je ne réalise pas, je suis dans ma bulle, confiait-il il y a quelques jours au Télégramme. Je viens, je m’entraîne et je prends du plaisir. Je rentre chez moi, je joue toujours à la Playstation, je ne me prends pas pour quelqu’un d’autre. » Pour le moment, ça lui réussit.

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