Il a fallu un message posté sur les réseaux, il y a quelques semaines, pour qu’il s’en rende compte. Interpellé par l’un de ses followers, Mathias Coureur a découvert qu’il était alors le joueur le plus efficace d’Europe depuis le début de saison. Devant Robert Lewandowski, Cristiano Ronaldo, Kylian Mbappé ou Lionel Messi. « Un mec m’a tagué en me disant que j’étais le meilleur buteur d’Europe, s’amuse l’attaquant du Tcherno More Varna, en Bulgarie. Moi, je ne savais même pas. J’étais content, mais je me suis dit que ça n’allait pas durer. J’ai retweeté parce que ça m’a fait plaisir et je l’ai envoyé à toute ma famille (sourire). Après, c’est devenu un petit jeu. Depuis, les gens regardent chaque week-end ce que j’ai fait. »
Et chaque week-end, ou presque, il abîme les filets adverses. Avec une régularité impressionnante. En quinze apparitions, le Français de 32 ans a déjà marqué quinze fois. Soit un but par match. Une moyenne qui le place largement en tête des meilleurs réalisateurs du championnat bulgare. Un classement dans lequel on retrouve notamment le Roumain Claudiu Keseru, passé par Nantes, Angers ou Bastia (sept buts). Le début de la Ligue des champions lui a fait perdre récemment son statut de plus fine gâchette d’Europe, au détriment de Lewandowski (Bayern Munich) et Haaland (Dortmund). En ne prenant en compte que les championnats, il conserve tout de même son trône à l’heure actuelle, à égalité avec l’attaquant du Bayern, auteur mercredi d’un doublé face à Wolfsburg (2-1).
Mieux que Mbappé, Benzema ou Ben Yedder
Et il se place de toute façon comme le Français le plus prolifique du Vieux Continent, toutes compétitions confondues. En faisant mieux que Kylian Mbappé (treize buts avec le PSG), Karim Benzema (dix avec le Real Madrid), Jean-Philippe Mateta (dix avec Mayence), Wissam Ben Yedder (sept avec Monaco) ou Florian Thauvin (cinq avec l’OM). Malheureusement pour lui, son heure de gloire est en sursis car le foot bulgare s’apprête à vivre une parenthèse hivernale. Comme chaque année, à l’approche des fêtes.
Après avoir perdu sur la pelouse du leader Ludogorets le week-end dernier (1-0), le Tcherno More ne rejouera pas avant mi-février. Mathias non plus, du coup. A l’inverse des clubs de Ligue 1, de Liga ou de Premier League. « Je sais que je vais me faire dépasser dans les semaines à venir, mais je le vis super bien. J’ai screené le classement pour garder ça en souvenir », glisse la star de Varna, une station balnéaire située à l’est du pays.
Une véritable star à Varna
C’est dans cette ville bordée par la Mer Noire que Coureur a décidé de revenir en début d’année. Là où il est un véritable héros depuis la finale de la Coupe de Bulgarie 2015 face au Levski Sofia (2-1, ap). Au terme d’un raid solitaire à la 119e, il a offert au Tcherno More son premier trophée depuis les années 1930. Avant d’inscrire dans la foulée le seul but de l’histoire du club en Coupe d’Europe, face au Dinamo Minsk (1-1), en barrages de la Ligue Europa. Un été de rêve qui a tissé un lien indéfectible entre le dribbleur du Val-de-Marne et la population locale. Une petite revanche pour le surdoué de Sucy-en-Brie, qui a été formé au Havre, avant de passer par Nantes, Beauvais et Gueugnon. Et de partir à l’étranger tenter sa chance.
Car Mathias revient de loin. Plombé par un début de carrière difficile et de mauvaises fréquentations, il a failli tout arrêter il y a une dizaine d’années. A la fin de son contrat au FCNA. Il a fallu que le natif de Fort-de-France aille se ressourcer en Martinique, auprès des siens, pour retrouver le plaisir de jouer. Jusqu’à endosser le maillot des Matinino, avec lesquels il compte sept sélections (deux buts), aux côtés notamment de Frédérique Piquionne ou Julien Faubert. Il a alors entamé sa trajectoire de globe-trotter…
Une carrière internationale
De la troisième division espagnole à la Géorgie, en passant par le Kazakhstan et la Corée du Sud, le parrain de l’association Ummanité n’a cessé de faire voyager ses crampons. Un parcours qui lui a permis de s’enrichir au contact de nouvelles langues et d’autres cultures. Mais c’est en Bulgarie qu’il se sent comme à la maison. A Varna, bien sûr, même s’il a aussi porté les couleurs du Lokomotiv Gorna Oryahovitsa durant six mois (fin 2016).
DR – Mathias Coureur, parrain de l’association Ummanité
Depuis son grand retour au stade Titcha (près de 8.000 places), Coureur vit sa meilleure vie de footballeur. « J’en profite parce que c’est ma plus belle saison sur le plan statistique. Pas forcément au niveau du jeu, mais je n’ai jamais autant marqué, savoure-t-il. Je suis en plein kiff. Il me reste deux-trois ans de foot. Je n’ai plus envie de me prendre la tête. » Son coach, Ilian Iliev, l’aligne au poste d’ailier gauche, dans un système en 4-3-3. Mais Coureur jouit d’une certaine liberté sur le pré. Et n’hésite pas à repiquer dans l’axe, dès qu’il en a envie.
« J’ai beaucoup épuré mon jeu »
« Avec l’âge, je déborde moins. Je joue plus avec ma tête Je suis plus attentif, explique-t-il. Dans les trente dernières mètres, c’est surtout de la concentration au final. Ce n’est pas seulement le talent qui parle. Sur un centre, il faut jaillir devant le défenseur, imaginer que le gardien peut la relâcher, toujours y croire jusqu’au bout. Je ne dribble presque plus. J’ai beaucoup épuré mon jeu. Je suis nettement plus efficace. »
Les médias locaux ne ratent évidemment pas une miette de ses prouesses. « Ils en parlent dans la presse bulgare. J’ai fait la Une d’un journal. Les supporters du club me l’ont envoyée, apprécie le n°19 des Vert et Blanc. Mais moi, j’évite de trop en parler. Parce qu’après, ça devient négatif. Ça peut mettre une pression inutile. D’ailleurs mon coach l’a rappelé lors d’un match où je n’ai pas marqué, en expliquant que l’équipe ne pouvait pas dépendre que de moi. »
Des parieurs pas tous sympathiques
Ses performances lui ont également apporté une notoriété nouvelle sur la toile. Certains spécialistes des paris sportifs en ont même fait un de leur chouchou. Pour le meilleur, mais aussi le pire. « Sur Twitter, je me suis amusé avec une team de parieurs, raconte Coureur. Un mec a conseillé à ses potes de parier sur moi. Ils l’ont fait et ils ont gagné de l’argent. On en a plaisanté gentiment. Mais dès que je n’ai pas marqué, c’est un truc de fou les insultes que j’ai reçues. Par des mecs que je ne connais même pas en plus. Il y a eu des messages privés qui parlaient de ma famille, de mon domicile. C’était abusé carrément. A mon niveau, je préfère en rire. Mais je n’imagine pas ce que les Messi ou les Ronaldo doivent recevoir à l’année… » La fameuse rançon. Jamais bien loin de la gloire.
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