Ligue 1: comment Nantes prépare ses joueurs à une éventuelle reprise

Dans cette période, l’aspect psychologique est très important. Comment le gérer?

C’était pour moi la plus grosse problématique. Au tout début du confinement les joueurs partaient presque « en vacances ». Très rapidement ils se sont rendus compte que ce n’était pas des vacances car le confinement c’est difficile à supporter d’un point de vue psychologique. J’ai des retours avec des joueurs qui ont de plus en plus de mal avec ça, qui ont du mal à aller courir à l’extérieur. On mesure aujourd’hui toute la difficulté de cette situation. On fait partie d’une catégorie de gens plutôt bien logés, il y a très peu de joueurs en Ligue 1 qui vivent dans 30m2. On vit le confinement dans un certain luxe.

Comment gèrent-ils leur quotidien?

On leur a proposé un programme sur cinq jours du lundi au vendredi. Une partie cardio de 40 minutes et une partie circuit renforcement musculaire de 25 minutes. Je sais que 90% des joueurs suivent de façon très stricte ce programme. Il y a quelques joueurs qui sont en adaptation en raison de blessures qu’ils avaient avant de partir en confinement ou sur des douleurs qui se sont réveillées pendant le confinement parce que courir sur d’autres surfaces a provoqué des douleurs sur d’autres muscles ou d’autres articulations.

J’ai un ou deux joueurs pour qui c’était un peu plus compliqué car ils avaient sans doute pris ça de manière un peu légère. Le fait de pratiquer un sport nous permet d’évacuer les tensions, de retrouver du confort mental, de s’occuper pendant une heure et de produire les hormones du plaisir qui doivent nous emmener vers un peu plus de confort psychologique sur la journée: les fameuses endorphines.

Est-ce que vous réfléchissez à un éventuel plan de reprise?

Pour tout vous avouer, ça change sans arrêt. Quand on allume la télévision on nous dit que ce sera pour le 15 avril puis que ce sera prolongé, que la rentrée des classes sera le 4 mai, puis que ça sera prolongé. Aujourd’hui on voyage un peu à vue, donc j’ai une vision à la semaine.

Quand on aura une date précise de la sortie du confinement puis des retours aux entraînements, je pourrais mettre en place un planning d’entraînements qui sera beaucoup plus précis pour qu’on arrive à la Jonelière avec un minimum de condition physique pour reprendre la compétition. Mais pour l’instant je ne me projette pas dans le futur car je vais commettre des erreurs étant donné qu’on n’a pas de date de reprise vraiment stricte.

Quelle est l’équation? Plus la coupure sera longue, plus le temps de reprise sera allongé?

Plus la capacité mentale des joueurs à continuer à s’entraîner chez eux sera importante et moins on aura de problème à la reprise. Le risque c’est une prise de poids, un désentraînement au niveau cardio-vasculaire, une fonte musculaire et là on aura de gros problèmes. Quand on lâche les joueurs pendant deux jours après un match, le premier jour de reprise est déjà très compliqué.

Mentalement il faut se remettre dans le bain. Le lendemain ça va beaucoup mieux. Si on laisse une semaine de repos sans rien faire, il en faut autant pour se relancer. C’est la problématique des joueurs blessés, quand ils s’arrêtent il faut du temps pour qu’ils retrouvent le niveau dans des efforts de compétition type match. Ça met du temps avant de retrouver les bonnes sensations.

A quoi peut ressembler une reprise des entraînements?

Quand on a une coupure à l’été on a en général quatre semaines de vacances. Quand on récupère les joueurs on s’aperçoit qu’ils ont une certaine base même s’ils ont énormément perdu dans l’enchaînement des courses à haute intensité. On doit remettre la machine en route progressivement. Aujourd’hui ça va être le même problème, quoique. J’ai lu une interview de Carlo Ancelotti qui disait que la reprise c’est un mythe puisque dans les clubs on reprend et une semaine après on est en voyage à droite à gauche pour faire des matchs amicaux. Là-dessus je le rejoins, il faudra reprendre le championnat le plus rapidement possible et on s’adaptera.

Il reste dix journées à enchaîner le plus rapidement possible pour qu’ensuite on puisse avoir une coupure. Car il faut penser que derrière il y aura une autre saison à faire redémarrer. On va vite rentrer dans le vif du sujet. Il faut compter sur le sérieux des joueurs pour qu’on aille rapidement dans la reprise de la compétition. L’objectif c’est que dès qu’on arrive à la Jonelière on ne perde pas de temps avec du travail physique sans ballon, qu’on reprenne tout de suite les exercices avec ballon et qu’on introduise ce qui n’aura pas été fait pendant le confinement: courses à haute intensité, enchaînement des sprints et rapidement passer à l’aspect technico-tactique.

Si on peut bénéficier de quinze jours en commun avant le premier match c’est bien. En deux semaines on fait pas mal de travail. L’été, dès la fin de la première semaine on fait souvent un match amical, la deuxième semaine deux matchs et la troisième semaine on est souvent à trois matchs en faisant tourner les effectifs. La problématique sera la même pour tous les clubs, on partira sur un pied d’égalité.

Avec des risques de blessures accrus?

Psychologiquement on va être heureux de retrouver le terrain, on va même péter le feu. Il faudra d’ailleurs contrôler un peu tout ça car on va libérer des fauves qui étaient en cage. Ça va partir dans tous les sens et c’est là qu’il faudra être prudent dans la gestion et la quantification des entraînements pour éviter que tout le monde parte dans le rouge et que ça pète de partout.

L’autre problématique c’est qu’actuellement la plupart courent sur la route, il va falloir changer de terrain. Ils vont revenir sur une surface en herbe, refaire des courses avec des changements de direction alors qu’actuellement ils ne font que des courses dans l’axe. Il va y avoir des contractions un peu plus importantes et c’est là qu’il va falloir être très bon dans la gestion des entraînements: ne pas vouloir tout faire d’un coup.

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