La « tension » du choc contre la République démocratique du Congo (2-2, 4 tab à 2), dimanche soir en huitièmes de la CAN 2019, est retombée. Pour faire place à de la joie, forcément, mais aussi de l’envie. Celle d’aller plus loin. Milieu de terrain des Herbiers, en National 2, Dimitry Caloin (29 ans) est l’un des joueurs binationaux appelés par Nicolas Dupuis en équipe nationale de Madagascar. Depuis Le Caire, le natif de Limoges explique comment les Barea se sont hissés jusqu’en quarts, et comment ils perçoivent l’engouement dans leur pays d’origine.

Quatre matchs, aucune défaite, une qualification pour les quarts… Est-ce que le groupe réalise ce qu’il se passe?

Non, franchement, on ne réalise pas encore. On est des compétiteurs, donc quand on rentre sur le terrain c’est forcément pour gagner, mais là c’est dingue, on a eu un petit aperçu de la ferveur à Madagascar… Après on est concentrés, et plus on gagne, plus on a envie de gagner, de prolonger l’aventure.

Vous auriez imaginé un tel scénario, il y a encore trois semaines?

Dans nos rêves les plus fous, on imaginait aller aussi loin, et même encore plus loin, mais le vivre c’est autre chose (rires). Ça fait partie de l’irréel, c’est juste exceptionnel. Je n’ai pas trop d’adjectifs pour décrire ça, en fait…

Comment vous expliquez vos performances face à des « gros », comme le Nigeria ou la RDC? C’est une question d’insouciance?

L’insouciance, je ne pense pas, étant donné qu’on a l’équipe avec la moyenne d’âge la plus élevée. On est tous des hommes plutôt sereins, assez posés mentalement. Donc non, pas forcément de l’insouciance. Et pas de la réussite non plus. Sur un match, ok on peut parler de chance, mais là on a gagné trois matchs sur quatre, on est invaincus… C’est juste la récompense d’un travail débuté il y a plus de deux ans pour les éliminatoires. Du travail, de la persévérance, et du cœur.

Vous étiez le « Petit Poucet » de la compétition. Le regard des autres équipes a changé depuis?

Oui, un peu. Et au-delà de ça, j’ai l’impression qu’on a gagné le cœur de l’opinion publique, et pas seulement à Madagascar, mais dans toute la planète foot. Parce qu’on est le « Petit Poucet », mais aussi parce qu’on montre de belles choses je crois, on a mis quelques jolis buts. Tant mieux!

La CAN est l’une des rares grandes compétitions internationales qui permet à des joueurs de divisions inférieures d’affronter des joueurs reconnus comme Iwobi, Obi Mikel, Bakambu… Vous arrivez à garder la tête froide?

C’est spécial, oui. Toute proportion gardée, c’est un peu comme la Coupe de France qui permet à des amateurs de tomber sur le PSG. C’est forcément top, il faut en profiter. Mais sur le terrain, comme on dit, on est tous égaux. A partir du moment où l’on débute le match, on ne pense plus du tout à ça, on ne fait aucun complexe d’infériorité. Si c’était le cas, on serait passés à la trappe depuis longtemps…

Madagascar IconSport – Madagascar

Votre sélectionneur évoquait l’apport des binationaux à l’équipe, ce qui est votre cas. Comment se passe la vie de groupe avec les joueurs locaux?

C’est ce qui fait notre force. On est connus pour notre esprit collectif, on a vraiment un groupe super uni. Ça n’a pas toujours été aisé pour nous, on a même traversé des moments difficiles, avec notre fédération notamment, avec des rencontres très dures à gérer d’un point de vue logistique… Tout ça nous a rassemblés. Aujourd’hui, on ne regarde plus si tel ou tel joueur vient de Madagascar, de France, ou même d’ailleurs, parce qu’on a des gars qui jouent en Algérie, en Bulgarie, en Thaïlande… La sélection nous fédère tous. C’est d’ailleurs le but d’une équipe nationale. Le fait de rester ensemble permet aussi de s’immerger un peu plus dans la culture malgache. Moi, je suis malgache du côté de ma mère, avec mon père français, donc j’ai toujours grandi avec cette culture. Mais l’ambiance en sélection, c’est forcément spécial.

Vous évoquiez la ferveur au pays. Vous suivez un peu ce qu’il se passe à Antanarivo?

On suit ça à travers les réseaux sociaux, on arrive à avoir un retour direct du pays. Tout le monde nous dit qu’une telle union, une telle ferveur, c’est du jamais-vu à Madagascar. On connaît les difficultés économiques du pays, donc si à notre petit niveau on peut apporter un peu de bonheur à tout un peuple, ça nous rend d’autant plus fiers. On aura déjà tout gagné.

Le président de la République est d’ailleurs venu vous encourager en huitièmes en emmenant 500 supporters dans son avion…

C’est ça, oui (rires). C’est super important pour nous d’être soutenus comme ça. Les stades sont un peu vides en Egypte, donc tout de suite, l’apport de 500 supporters dans une tribune, ça peut aider à faire la différence quand le match est compliqué.

Il vous a parlé?

Oui, il est venu nous parler avant et après le match. On a pu fêter un peu la qualif’ avec lui dans le vestiaire, même si ça reste le président, donc c’est encadré, ce n’est pas le copain d’à côté. Mais il avait l’air heureux de partager ça avec nous.

Un de vos équipiers, Lalaina Nomenjanahary, a dit que quoi qu’il arrive désormais, cette CAN sera une victoire. C’est aussi votre point de vue?

Bien sûr. Quand on voit l’osmose créée à Madagascar, on aura forcément gagné. Maintenant on est des compétiteurs comme je le disais, donc si on perd jeudi en quarts, on sera énormément déçus. On reste concentrés, on veut réussir une belle performance. L’objectif c’est de gagner, pas de faire bonne figure.

La Tunisie en quarts, c’est jouable?

Il y a toujours de la place… Ça sera difficile, ça l’a déjà été en huitièmes, et ça risque de l’être davantage encore. Mais on va y aller sereinement. Comme toujours.

https://rmcsport.bfmtv.com/football/can-2019-joueur-en-national-2-caloin-raconte-l-incroyable-parcours-de-madagascar-1727904.html

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